Les autres Einstein…

Il y a peu, j’ai découvert qu’Albert Einstein avait eu une famille. Révélation. Les génies et les grands personnages de l’histoire sont aussi des gens normaux, même si ce n’est pas ce qu’on retient. Ça ne m’avait pas effleuré l’esprit et j’ai d’ailleurs découvert que j’ignorais la plus grande partie de l’existence du père de la théorie sur la relativité, et notamment que le terme de père n’était finalement pas le qualificatif qui lui correspondait le mieux. Deux livres pour découvrir un peu la vie d’Albert Einstein et de ceux qui ont gravité autour de lui.

Le cas Eduard Einstein (Laurent Seksik, 2013)

Dans la famille Einstein, je voudrais le fils. Chronologiquement parlant, ce livre devrait être en seconde position car avant le fils était la mère et sans la mère pas de fils, mais c’est celui que j’ai lu en premier et je pense finalement que c’est une bonne idée dans cet ordre.

Ici, Laurent Seksik raconte les années adultes d’Eduard, second fils d’Albert Einstein et de Mileva Marić. Lorsqu’il sombra dans la folie, pour passer ensuite le reste de son existence entre le Burghölzli (l’hôpital psychiatrique de Zurich) et le domicile de sa mère. Cela fait maintenant bien longtemps qu’Albert et Mileva sont séparés, et son grand frère Hans Albert a sa propre vie à mener loin de là. L’auteur fait dire de très belles choses à la folie d’Eduard, une folie drôle et intelligente, et au détour de crises, d’allers-retours au Burghölzli et de nouveaux traitements, on découvre peu à peu la vie qui fut celle d’Albert Einstein et de Mileva Marić. Cette dernière, une jeune scientifique serbe venue à Zurich étudier à l’institut Polytechnique, un univers d’hommes, n’est pas retenue par l’histoire. Et pourtant… Elle y rencontre Albert Einstein et devient sa femme, pour le meilleur et pour le pire. Le meilleur pour lui et le pire pour elle, semble-t-il. Mileva Marić apparaît dans ce livre comme une femme très seule, abandonnée depuis longtemps, qui tente de s’occuper au mieux de son fils malade. Un fils à qui il manque désespérément un père, auquel il voue une haine teintée de tristesse. 

C’est un très beau livre, peuplé de personnages seuls. C’est triste mais très joliment écrit et parfois drôle. Les réflexions d’Eduard sont souvent très intéressantes et bien sûr loufoques, mais on découvre aussi en parallèle la trajectoire de la mère et du père. La mère auprès de son fils. Le père toujours loin par le corps comme par l’esprit, et qui finit même par quitter l’Europe pour les Etats-Unis lorsque la menace de l’Allemagne nazie devint trop grande. Il ne revit jamais son fils et la photo que l’ont voit sur la couverture témoigne de ce dernier moment ensemble, au Burghölzli, avant le départ. Le reste de la vie d’Albert Einstein est bien connue, celle d’Eduard et de Mileva Marić fut plus triste et solitaire. 

Madame Einstein (Marie Benedict, 2016)

J’ai adoré et détesté ce livre ! Comprenez-moi bien, je l’ai surtout adoré et je le recommande sans hésiter, mais son histoire m’a parfois mise en rage. 

Dans la famille Einstein donc, l’épouse et la mère, Mileva Marić. Le début du livre est enthousiasmant. Une jeune scientifique brillante quitte sa Serbie d’origine pour venir à Zurich dessiner le début de la grande carrière à laquelle elle est promise. Son cerveau trop bien fait et sa boiterie n’ont pas fait d’elle une jeune fille très populaire à l’école et elle n’a pas d’amis à regretter dans son pays au moment où elle arrive en Suisse pour étudier à l’institut Polytechnique. C’est à partir de là que sa vie semble commencer. Ce que son père a toujours rêvé pour elle prend forme. Des études brillantes et des amies fidèles. Un jeune homme qui ne faisait pas partie du plan commence même à la courtiser. Inespéré.

Et c’est là le grain de sable dans la vie d’une femme. C’est à ce moment-là que l’histoire bascule tranquillement vers le cauchemar. Le jeune homme adorable avec qui Mileva Marić peut laisser libre cours à ses idées et son génie scientifique évolue peu à peu et la vie de la jeune femme avec… Je n’en dis pas trop pour ceux qui comme moi ne savaient rien de la vie de cette grande physicienne, mais rien que ce quasi anonymat en dit long. De ce couple et de ce mariage naquit le grand Albert Einstein, et dans son ombre mourut la vie qu’aurait dû mener Mileva Marić. La reconnaissance qui lui revenait probablement également.

Il faut rappeler que ce livre de Marie Benedict est d’abord un roman. Elle y raconte les grands faits qui ont composés la vie de Mileva Marić en romançant son histoire et en comblant les blancs. Tout ne s’est donc pas véritablement passé tel qu’elle le raconte, mais les faits principaux, tirés des nombreuses lettres échangées entre Albert Einstein et sa première épouse, y sont. Tout de même, malgré le récit qu’il ne faut pas prendre au pied de la lettre, c’est extrêmement énervant. Triste et rageant. On dit que derrière chaque grand homme se cache une femme et c’est précisément à ce dicton que fait penser le livre. Il donne aussi envie de casser des tas de choses, à commencer par la figure d’Albert Einstein…

Deux histoires autour du grand Albert Einstein donc, pour raconter qu’en privé cet homme n’avait peut-être finalement rien de grand, bien au contraire… C’est triste et révoltant, mais certainement très courant, surtout à cette époque. Je conseille les deux lectures que j’ai trouvées très intéressantes. La première pour sa légèreté et sa poésie mélancolique, la seconde pour son récit prenant et son personnage attachant que l’on a envie de défendre. Les deux enfin, pour la découverte de cette histoire personnelle derrière l’histoire publique. A lire ! Sauf si on n’a pas envie de sa fâcher avec Einstein… Moi, je suis définitivement fâchée.


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