Il y a des livres qui croisent notre chemin de vie d’une drôle de façon. Il y a un ou deux ans je m’étais lancée dans l’écriture d’une nouvelle sur un gros pigeon qui habitait en face de chez moi (et qui vit toujours là, a priori). Je trouvais l’idée rigolote et ça m’avait bien occupée quelques temps. Peu après ça, je m’étais retrouvée presque par hasard dans une boutique de livres d’occasion à chercher la perle rare parmi les étagères de livres (pour en acheter finalement un demi-million comme à chaque fois). Il y en a tellement qu’il y a deux techniques : lire les titres pour repérer ceux qui ont l’air intéressants ou qui nous ont été conseillés par de belles âmes, ou ne regarder que les auteurs pour resserrer les recherches. J’en étais à la technique des auteurs quand je suis tombée sur Patrick Süskind, écrivain et scénariste allemand, dont j’avais lu Le Parfum (que je recommande !). Je pensais un peu bêtement qu’il n’avait écrit que ce livre et ça a attiré mon attention. En attrapant le petit livre je me suis retrouvée nez à bec avec le pigeon éponyme de la couverture. Je n’étais donc pas la seule à me mettre à écrire sur des pigeons et mon compagnon de folie littéraire n’étant pas n’importe qui, ça m’a intriguée et j’ai pris le livre.

Après l’avoir laissé seul vivre sa vie de livre dans ma bibliothèque et profitant d’un long weekend en famille, je me suis enfin attaquée à cette histoire de pigeon. C’est un tout petit roman de moins de cent pages qui se lit rapidement. Je l’ai picoré en une journée (oui, j’assume le jeu de mot fumeux) et j’ai bien aimé cette histoire qui pourrait presque rejoindre mes chroniques de la médiocrité. Plus qu’un pigeon, on suit en fait Jonathan le temps d’une journée. Un homme à la vie réglée comme une montre suisse qui voit son quotidien voler en éclat pour avoir simplement croisé un oiseau dans le couloir. C’est simple, mais très intéressant. La vie humaine même la plus organisée et banale reste toujours instable et fluctuante, avec des déclencheurs, des chemins parallèles, des habitudes qui déraillent et toute une collection de failles. C’est une histoire d’homme ordinaire, de pigeon pas gêné et de dominos qui dégringolent en cascade après s’être tenus bien droits pendant des décennies.
Je n’en dis pas plus car ce serait trop mais je conseille en tout cas de lire Le Pigeon, d’autant que c’est une lecture rapide et claire sur un sujet pas plus compliqué qu’une vie modeste. Ça peut être une belle porte d’entrée dans le monde de la littérature ou un bon intermède entre deux grosses lectures. Le plus drôle dans cette histoire est qu’à l’heure où j’écris ces lignes je suis à Lyon chez ma cousine, qui elle a réellement une bande de pigeons pour voisins. Il y a de grandes ouvertures dans la cage d’escalier et de nombreux oiseaux habitent l’immeuble à l’année. Il y a même un nid avec deux oisillons à deux pas de la porte d’entrée ! Espérons simplement qu’il ne nous arrivera pas la même mésaventure qu’à Jonathan…